La marqueterie de paille : un art à part entière !

La marqueterie de paille est un artisanat d’art très ancien qui consiste à coller un matériau végétal, la paille, sur un support, généralement en bois, pour créer un élément de décoration ou une œuvre d’art.

Du Néolithique à l’Antiquité
Dès le Néolithique, l’humanité se sédentarise, invente l’agriculture et fait pousser des céréales, dont elle utilise la paille pour construire ses premières habitations. Que ce soit pour l'alimentation, la protection contre le froid et l'humidité, la fabrication d'objets décoratifs ou utilitaires, les céréales ont été utilisées par les anciens Sumériens et Akkadiens, les Égyptiens, jusqu’aux Celtes, qui  ont également utilisé des motifs inspirés de la vannerie pour décorer leurs bijoux et miroirs.
Une technique qui progresse au XVIIe siècle
Au XVIIe siècle, l'utilisation de la paille en marqueterie commence à se répandre, bien que son origine ne soit pas clairement définie. Il est néanmoins possible que les échanges culturels et commerciaux entre l'Asie, l'Europe et les marchands vénitiens aient favorisé son utilisation. Les Grandes Découvertes ont également contribué à l'essor de la fabrication de meubles recouverts de marqueteries en bois exotiques, ainsi que de coffrets et tabletteries en paille, un matériau abondant et peu coûteux. Les techniques de marqueterie à la paille comprenaient principalement le travail en applique, où les brins de paille étaient collés côte à côte sur un fond noir, créant un premier élément de décor en soi. Les motifs floraux étaient également réalisés en surépaisseur, tandis que les sujets étaient principalement d'ordre religieux.
Et qui atteint son apogée au XVIIIe siècle
Au XVIIIe siècle, les marqueteries et broderies de paille deviennent très populaires.

Ainsi, le marchand Chervain, spécialisé dans les petits objets en marqueterie de paille, vante ses « boëtes de paille de la Chine travaillée avec différents dessins qui imitent parfaitement les fleurs et les ornements qu’emploient les Chinois. »

Cependant, leur datation et attribution sont souvent difficiles, car les artistes ne signent pas leurs œuvres.

À l’époque, Amsterdam est la plus importante ville marchande d’Europe et un marqueteur de paille hollandais, travaillant dans la ville de Leyde, commence à dater et signer ses œuvres, le plus souvent, par ses initiales : C.H.H. Considéré comme l’un des premiers artistes connus dans ce domaine, Carl Hinrich Hering (1695-1736) produit des objets d’une grande finesse, parfois avec des inscriptions gravées à la pointe sèche.

Les moines tissent également des tableaux de broderie en paille d’une grande beauté.

En France, Georges-Roland Morel développe une technique de gaufrage de la paille pour créer des scènes religieuses.
À Paris et dès 1652, les ouvrages de paille deviennent des bibelots à la mode vendus par les merciers. Le poète Berthod, l’un des auteurs du recueil « Paris ridicule et burlesque au dix-septième siècle », décrit ainsi la ville et ses marchands de la galerie du Palais :

 « Approchez-vous icy, Madame ?
Là, voyez donc, venez, venez
Voicy ce qu’il vous faut, tenez !
Dit un marchand qui crie
Du milieu de la Gallerie.
J’ai de beaux masques et de beau glans
De beaux mouchoirs, de beaux galans :
Venez icy, Mademoiselle,
J’ay de bellisime dentelle,
Des points coupez qui sont fort beaux,
De beaux estuis, de beaux cizeaux,
De la neige des plus nouvelles ;
Un manchon, un bel éventail,
Des pendans d’oreilles d’émail,
Une coëffe de crapaudaille ;
J’ay de beaux ouvrages de paille. »


Il semblerait même que Louis XVI ait commandé de la paille pour décorer une pièce du Trianon à Versailles.
Au XIXe siècle : le métier du pauvre !
Au XIXe siècle, la création d’une grande quantité de bagnes en Europe pour incarcérer les prisonniers de guerre et les galériens conduit à la production d’objets artisanaux par les prisonniers et bagnards. Les objets, souvent des coffrets décorés de marqueterie de paille, sont reconnaissables à leur raideur d’exécution et leur naïveté d’inspiration, mais sont également empreints d’une grande émotion. Le camp anglais de Norman Cross était un exemple de marché où les prisonniers vendaient leur production aux bourgeois et marchands locaux. Cependant, tous les objets de cette époque ne provenaient pas des bagnes, certains étaient également fabriqués par des nonnes ou des artisans civils. Raison pour laquelle on surnommait à l’époque la marqueterie de paille : le métier du pauvre.
Un renouveau au XXe siècle
Au XXe siècle, la marqueterie de paille connait un renouveau grâce à deux grands décorateurs parisiens, André Groult et Jean-Michel Franck. Ces derniers l’utilisent à grande échelle dans leurs créations. Groult recouvre des meubles, des murs et des paravents avec de la paille, tandis que Franck l’utilise pour réaliser des décors géométriques appelés éventails ou soleils. Cependant, les deux grands conflits mondiaux mettent fin à cet élan. Ainsi, il faut attendre les années 1950, pour que d’autres designers tels que Jean Royère, Daniel Langlois-Berthelot et Bernard Ayard reprennent le flambeau.
De nos jours : un art à part entière, en pleine renaissance !
Dans les années 1950, Jean Royère (1902-1981) réalise pour une clientèle aisée du mobilier à base de bois, de tôle perforée et de marqueterie de paille. L’ensemble conçu pour la chambre du chanteur Henri Salvador en est un exemple des plus remarquables.

Dans les années 1970, Lison de Caunes, petite-fille d’André Groult, fait figure de pionnière et travaille sans relâche pour assurer la pérennité de cet art merveilleux. Ainsi, elle crée son propre atelier et une association pour fédérer les créateurs contemporains de la marqueterie de paille en France et à l’étranger.

Aujourd’hui, certains créateurs mélangent la paille avec d’autres matériaux pour créer des œuvres innovantes. De plus, en 2007, deux femmes ont été les premières à recevoir le titre de Meilleurs Ouvriers de France pour la marqueterie de paille : Marine Fouquet, de Paris, et Sandrine Viollet, de New York. Elles illustrent ainsi la renaissance de cet art où la créativité, l’esthétique et l’innovation technique sont mises au service d’une virtuosité sans égale.

La marqueterie de paille offre une variété quasi infinie d’utilisation selon l’inspiration de l’artiste. De l’abstraction à la figuration, du monochrome au polychrome et des plus petites œuvres à celles de très grande taille. De plus, sa qualité principale reste sa luminosité et son aspect chatoyant qui vient de la réfraction de la lumière. Sa couleur dirige l’ombre, le volume et les détails, et le positionnement des fibres est essentiel pour obtenir un rendu optimal. Les marqueteries en paille évoluent avec la lumière du jour, révélant des détails sous différents éclairages.

Enfin, de plus en plus appréciée par les décorateurs et architectes, à l’instar de Jacques Garcia, Peter Marino, Jean-Louis Deniot ou Hubert Le Gall, elle retrouve sa place dans les intérieurs, notamment de prestigieuses enseignes.
La marqueterie de paille est un artisanat d’art très ancien qui consiste à coller un matériau végétal, la paille, sur un support, généralement en bois, pour créer un élément de décoration ou une œuvre d’art.

Du Néolithique à l’Antiquité

Dès le Néolithique, l’humanité se sédentarise, invente l’agriculture et fait pousser des céréales, dont elle utilise la paille pour construire ses premières habitations.

Que ce soit pour l’alimentation, la protection contre le froid et l’humidité, la fabrication d’objets décoratifs ou utilitaires, les céréales ont été utilisées par les anciens Sumériens et Akkadiens, les Égyptiens, jusqu’aux Celtes, qui  ont également utilisé des motifs inspirés de la vannerie pour décorer leurs bijoux et miroirs.

Une technique qui progresse au XVIIe siècle

Au XVIIe siècle, l’utilisation de la paille en marqueterie commence à se répandre, bien que son origine ne soit pas clairement définie. Il est néanmoins possible que les échanges culturels et commerciaux entre l’Asie, l’Europe et les marchands vénitiens aient favorisé son utilisation. Les Grandes Découvertes ont également contribué à l’essor de la fabrication de meubles recouverts de marqueteries en bois exotiques, ainsi que de coffrets et tabletteries en paille, un matériau abondant et peu coûteux. Les techniques de marqueterie à la paille comprenaient principalement le travail en applique, où les brins de paille étaient collés côte à côte sur un fond noir, créant un premier élément de décor en soi. Les motifs floraux étaient également réalisés en surépaisseur, tandis que les sujets étaient principalement d’ordre religieux.

Et qui atteint son apogée au XVIIIe siècle

Au XVIIIe siècle, les marqueteries et broderies de paille deviennent très populaires.

Ainsi, le marchand Chervain, spécialisé dans les petits objets en marqueterie de paille, vante ses « boëtes de paille de la Chine travaillée avec différents dessins qui imitent parfaitement les fleurs et les ornements qu’emploient les Chinois. »

Cependant, leur datation et attribution sont souvent difficiles, car les artistes ne signent pas leurs œuvres.

À l’époque, Amsterdam est la plus importante ville marchande d’Europe et un marqueteur de paille hollandais, travaillant dans la ville de Leyde, commence à dater et signer ses œuvres, le plus souvent, par ses initiales : C.H.H. Considéré comme l’un des premiers artistes connus dans ce domaine, Carl Hinrich Hering (1695-1736) produit des objets d’une grande finesse, parfois avec des inscriptions gravées à la pointe sèche.

Les moines tissent également des tableaux de broderie en paille d’une grande beauté.

En France, Georges-Roland Morel développe une technique de gaufrage de la paille pour créer des scènes religieuses.

À Paris et dès 1652, les ouvrages de paille deviennent des bibelots à la mode vendus par les merciers. Le poète Berthod, l’un des auteurs du recueil « Paris ridicule et burlesque au dix-septième siècle », décrit ainsi la ville et ses marchands de la galerie du Palais :

« Approchez-vous icy, Madame ?
Là, voyez donc, venez, venez
Voicy ce qu’il vous faut, tenez !
Dit un marchand qui crie
Du milieu de la Gallerie.
J’ai de beaux masques et de beau glans
De beaux mouchoirs, de beaux galans :
Venez icy, Mademoiselle,
J’ay de bellisime dentelle,
Des points coupez qui sont fort beaux,
De beaux estuis, de beaux cizeaux,
De la neige des plus nouvelles ;
Un manchon, un bel éventail,
Des pendans d’oreilles d’émail,
Une coëffe de crapaudaille ;
J’ay de beaux ouvrages de paille. »

Il semblerait même que Louis XVI ait commandé de la paille pour décorer une pièce du Trianon à Versailles.

Au XIXe siècle : le métier du pauvre !

Au XIXe siècle, la création d’une grande quantité de bagnes en Europe pour incarcérer les prisonniers de guerre et les galériens conduit à la production d’objets artisanaux par les prisonniers et bagnards. Les objets, souvent des coffrets décorés de marqueterie de paille, sont reconnaissables à leur raideur d’exécution et leur naïveté d’inspiration, mais sont également empreints d’une grande émotion. Le camp anglais de Norman Cross était un exemple de marché où les prisonniers vendaient leur production aux bourgeois et marchands locaux. Cependant, tous les objets de cette époque ne provenaient pas des bagnes, certains étaient également fabriqués par des nonnes ou des artisans civils. Raison pour laquelle on surnommait à l’époque la marqueterie de paille : le métier du pauvre.

Un renouveau au XXe siècle

Au XXe siècle, la marqueterie de paille connait un renouveau grâce à deux grands décorateurs parisiens, André Groult et Jean-Michel Franck. Ces derniers l’utilisent à grande échelle dans leurs créations. Groult recouvre des meubles, des murs et des paravents avec de la paille, tandis que Franck l’utilise pour réaliser des décors géométriques appelés éventails ou soleils. Cependant, les deux grands conflits mondiaux mettent fin à cet élan. Ainsi, il faut attendre les années 1950, pour que d’autres designers tels que Jean Royère, Daniel Langlois-Berthelot et Bernard Ayard reprennent le flambeau.

De nos jours : un art à part entière, en pleine renaissance !

Dans les années 1950, Jean Royère (1902-1981) réalise pour une clientèle aisée du mobilier à base de bois, de tôle perforée et de marqueterie de paille. L’ensemble conçu pour la chambre du chanteur Henri Salvador en est un exemple des plus remarquables.

Dans les années 1970, Lison de Caunes, petite-fille d’André Groult, fait figure de pionnière et travaille sans relâche pour assurer la pérennité de cet art merveilleux. Ainsi, elle crée son propre atelier et une association pour fédérer les créateurs contemporains de la marqueterie de paille en France et à l’étranger.

Aujourd’hui, certains créateurs mélangent la paille avec d’autres matériaux pour créer des œuvres innovantes. De plus, en 2007, deux femmes ont été les premières à recevoir le titre de Meilleurs Ouvriers de France pour la marqueterie de paille : Marine Fouquet, de Paris, et Sandrine Viollet, de New York. Elles illustrent ainsi la renaissance de cet art où la créativité, l’esthétique et l’innovation technique sont mises au service d’une virtuosité sans égale.

La marqueterie de paille offre une variété quasi infinie d’utilisation selon l’inspiration de l’artiste. De l’abstraction à la figuration, du monochrome au polychrome et des plus petites œuvres à celles de très grande taille. De plus, sa qualité principale reste sa luminosité et son aspect chatoyant qui vient de la réfraction de la lumière. Sa couleur dirige l’ombre, le volume et les détails, et le positionnement des fibres est essentiel pour obtenir un rendu optimal. Les marqueteries en paille évoluent avec la lumière du jour, révélant des détails sous différents éclairages.

Enfin, de plus en plus appréciée par les décorateurs et architectes, à l’instar de Jacques Garcia, Peter Marino, Jean-Louis Deniot ou Hubert Le Gall, elle retrouve sa place dans les intérieurs, notamment de prestigieuses enseignes.